mercredi 14 mars 2018

UGC Culte: El laberinto del fauno (2006)

J'ai profité de la suspension de mes cours de yoga du jeudi pendant les vacances scolaires pour me faire une séance UGC Culte, un plaisir bien trop rare à mon goût. Et quel plaisir de découvrir le Labyrinthe de Pan de Guillermo del Toro sur grand écran! Je n'avais jamais vu ce film dont j'avais entendu dire beaucoup de bien et il s'est révélé à la hauteur de sa réputation.


En 1944, une toute jeune fille espagnole, Ofelia, et sa mère enceinte rejoignent le deuxième mari de celle-ci à la montagne. L'homme, officier de l'armée régulière, est chargé de traquer les résistants qui s'opposent encore au régime de Franco malgré leur défaite dans la guerre civile. Ofelia découvre dans la forêt autour de leur habitation un étrange labyrinthe de pierre abandonné. Elle ne tardera pas à y revenir de nuit, guidée par une fée (oui!), et à y rencontrer un vieux faune qui lui révèlera qu'elle devra passer trois épreuves avant la pleine lune afin de rejoindre le royaume magique dont elle vient et dont elle ne se souvient pas.

Réalité et rêve s'entremêlent dans cette histoire triste, dure et tragique mais également pleine d'humanité et de sentiments forts, et empreinte d'un héroïsme extrêmement remarquable parce que très diversifié. Guillermo del Toro a compris qu'on peut être un héros de bien des manières et il le montre! J'ai adoré cette palette de personnages authentiques qui m'ont beaucoup marquée. Ofelia (jouée par Ivana Baquero, remarquable) ne comprend pas bien ce qu'il se passe autour d'elle, dans le monde des adultes (et heureusement pour elle, quelque part...), mais elle sent la tristesse de sa mère et voudrait tout faire pour que les choses aillent bien. Elle saura affronter des horreurs dans la nuit pour passer ses trois épreuves mais aussi tenir tête à son beau-père, pendant humain des monstres magiques. Mercedes (Maribel Verdú), l'intendante de la maison, fait preuve d'un courage incroyable en s'engageant pour aider les résistants alors qu'elle travaille sous les ordres de l'homme chargé de les exterminer. Le docteur (Alex Angulo) prend aussi énormément de risques et finit par prendre une décision terrible, dans une scène d'une incroyable justesse émotionnelle qui pose énormément de questions sur ce qu'est la dignité et sur ce qu'on est prêt à faire.

Le contexte de la guerre civile espagnole est très bien exploité pour faire ressortir la dignité de certains et la cruauté d'autres. Le seul reproche qu'on pourrait faire à ce film, c'est que le capitán Vidal est un horrible militaire insensible qui relève quelque peu du cliché; mais pourtant lui aussi est parfaitement crédible et a du caractère, bref n'est pas un personnage de papier. J'ai pensé une fois de plus, comme je l'avais déjà fait dans des lectures passées (à la belle époque où je lisais régulièrement en espagnol, ce qui n'est plus du tout le cas aujourd'hui), que l'Espagne digère encore aujourd'hui un énorme traumatisme lié à la guerre civile et au franquisme, probablement lié au fait que le franquisme a perduré pendant trente ans après la Seconde Guerre mondiale. C'est donc une génération de plus qui l'a connu par rapport à l'Italie (où la génération d'après-guerre, celle du baby boom et de mes parents, n'a pas connu le fascisme), et cela n'a rien à voir avec Vichy pour la France.

En parallèle de ces évènements terribles, le film ne manque pas de sentiments. Au contraire, l'amitié et l'amour survivent malgré tout. Il y a l'amour d'Ofelia pour sa mère et vice-versa: la scène où elles s'endorment ensemble est tellement simple et vraie. Il y a l'amour que Mercedes et Ofelia échangent, leur amitié qui nait dans ce contexte terrible, sous la coupe d'un homme dur et dangereux. L'amour pour un tout petit enfant aussi. Et un sentiment fort qui n'a pas de nom qui surgit face à la mort: je pense à la scène de la décision du docteur, cette compassion extrême à l'instant le plus crucial.

Ce qui fait tout le sel de ce film, bien sûr, c'est aussi le monde fantastique dans lequel Ofelia doit passer ses trois épreuves: le labyrinthe où vit le faune, l'arbre du crapaud, la salle à manger de la créature de cauchemar. On voit bien la patte de del Toro, qui prouve qu'il est un excellent réalisateur! À côté, Pacific Rim – film que j'adore pourtant avec une hystérie considérable – fait vraiment pâle figure... Je savais que le film se passait en grande partie dans notre monde et que les séquences fantastiques étaient minoritaires, mais elles valent vraiment le détour. J'ai adoré ce monde ancien et aussi fascinant que dangereux!

C'était également un plaisir de voir un film en version originale espagnole. C'est extrêmement rare et cela m'a permis de confirmer quelques traductions rencontrées dernièrement (car depuis quelques mois l'espagnol est la principale langue source de mes traductions, une évolution tout à fait inattendue), comme despacho pour bureau... Et  j'ai exulté en repérant quelques concordances des temps, comme un certain "hubiera podido obedecerme"...

Voilà, une très belle découverte et un moment riche d'émotions que je n'oublierai pas. Le mot de la fin: on me signale que c'est Doug Jones, alias Saru dans la série Discovery et la créature aquatique dans la Forme de l'eau, qui joue le faune et la créature de cauchemar... 😃

8 commentaires:

  1. Je ne l'ai pas vu mais je note qu'il est à rattraper :)

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  2. Il faut que je le revois un jour ce film, il était superbe en effet (même s'il m'avait un peu remué quand même...)

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    1. Oui. Je n'en ai pas parlé mais je suis sortie de la salle en pleurant. ^^

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  3. Son meilleur film, tout simplement. Il est d'une richesse folle, del Toro n'a jamais réussi à reproduire une telle densité depuis (mais le souhaite-t-il vraiment ?).

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    1. Oui, il me semble tellement au-dessus et différent des autres! Ensuite, les Hellboy et Pacific Rim ne se prêtent pas du tout au même genre de message. La forme de l'eau aurait pu en approcher, par contre.

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